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Procès des Templiers par M. Lavocat

Procès

Procès des Frères et de l'Ordre du Temple - M. Lavocat

Nous offrons au public curieux d'histoire un livre intéressant, dans lequel abondent de nombreux documents peu connus.

On l'a dit bien des fois, « l'abolition de la milice du Temple est un des mystères de l'histoire les plus obscurs; les nombreuses pièces du procès donnent les motifs et non les causes véritables de cette mesure terrible » L'auteur a essayé de pénétrer ces causes et de les préciser.

Elles sont multiples

La ruine du Temple fut la conséquence de la lutte engagée par le pouvoir royal temporel contre le pouvoir spirituel, lutte dont Philippe le Bel sortit vainqueur contre Boniface VIII.

Le Roi voulut poursuivre ses avantages. Philippe provoqua la destruction d'un Ordre religieux et militaire créé uniquement pour la défense de la Terre Sainte, pour la Croisade, et qui était plutôt le sujet des Papes que le sujet des Rois.

Les acquisitions faites depuis près de deux siècles par les Templiers, leurs nouveaux acquêts, étaient devenus considérables ; l'Ordre absorbait peu à peu une partie du territoire français. Déjà du temps de Mathieu Paris, vers le milieu du treizième siècle, les Templiers avaient des possessions immenses, ils étaient aussi riches que les rois.

Philippe le Bel eut pour objectif de faire rentrer dans son domaine de fieffeux-souverain ces biens considérables, qui en étaient sortis pour devenir biens de mainmorte, libres, affranchis de tous services réels et personnels, ne rapportant plus rien à l'État. Le Roi voulut combler les vides du trésor épuisé, créer des ressources au moyen de perceptions de droits de mutation, de droits de lods et ventes, de droits de francs-fiefs à payer par de nouveaux possesseurs. Le but du Roi était de réunir en sa main tous les démembrements de fiefs des barons acquis par le Temple, amortis en partie au profit de l'Ordre, et surtout ceux non amortis.

Philippe le Bel trouvait d'un seul coup des ressources financières ; il avait sa nouvelle noblesse, les chevaliers es lois avides de biens et de récompenses, la bourgeoisie aspirant à la noblesse, les hommes de poésie (les roturiers) devenus, sous Philippe le Hardi, capables de détenir et posséder des fiefs : de nouvelles inféodations, des aliénations auraient procuré immédiatement au Roi les avantages pécuniaires dont le Trésor avait un impérieux besoin.

Philippe a-t-il cherché à frapper en même temps la noblesse de son royaume, comme on Ta prétendu ? Sans doute, l'Ordre du Temple se composait de nobles ; mais on n'a pas fait attention que cette communauté, avec ses éléments spirituels et temporels, était haïe de la noblesse du royaume, qui supportait seule les charges de la féodalité et du service militaire. Les privilèges nombreux, les exemptions dont jouissait la milice sacrée, créaient à la noblesse du royaume des obligations qui, chaque jour, prenaient une plus large extension.

Philippe le Bel, en provoquant la destruction du Temple, frappa les nobles qui composaient cet Ordre ; mais ce coup terrible n'atteignit pas directement la noblesse. Le but du Roi fut au contraire d'en ouvrir les rangs à ceux qu'il jugeait dignes et capables de rendre des services à l'État, avec tous les droits et privilèges de la noblesse, mais aussi avec tous les devoirs et obligations de celle déjà existante.

Le Roi avait plus besoin d'une noblesse que la noblesse n'avait besoin du Roi. Sans la noblesse, à cette époque, la France n'aurait pas eu d'armées, pas de généraux, pas d'officiers, pour conduire leurs hommes et ceux des communes à la bataille ; pas d'argent, pas de ces armements, de ces approvisionnements nécessités par les guerres que Philippe le Bel avait à soutenir.

Mais l'intention du Roi, son intention bien caractérisée, fut de porter un coup à l'Église romaine, de diminuer la richesse, l'influence, la puissance territoriale dont l'Église jouissait en France au treizième et au quatorzième siècle.

Les causes peuvent donc se résumer ainsi

Causes féodales, financières ou budgétaires, si l'on veut se servir d'une expression des temps modernes ; le Roi eut l'ambition d'agrandir son domaine, sa puissance souveraine personnelle : la nation était appauvrie, les besoins du Trésor étaient urgents, Philippe espéra enrichir l'État, et s'enrichir lui-même des dépouilles de l'Église du Temple.

Le Roi manqua son but

Les motifs ne furent que des prétextes. La défense de la religion, prétexte inique, étrange de la part d'un Roi se disant le premier champion de l'Église, mais employant tous les moyens pour réduire le pouvoir et l'autorité du Saint-Siège.

Les agissements de Philippe le Bel devaient avoir un résultat négatif. L'Église demeura aussi puissante, sous les rois ses successeurs, que par le passé, plus puissante même qu'elle ne l'avait été du temps de Louis IX.

Des moyens déplorables, la terreur qu'inspirait ce Roi redoutable (metuendissimus) entraînèrent un Pape. La mémoire de Philippe le Bel, la mémoire de Clément V resteront chargées dans l'histoire. Les flammes dévorèrent une grande partie de cette noblesse du Temple, composée d'hommes d'une bravoure à toute épreuve, d'une orthodoxie conforme à sa règle.

Le Roi manqua son but, avons-nous dit ; l'Ordre du Temple (et ceci est fort important à retenir) n'a été ni jugé ni condamné en jugement ; les immeubles ne furent donc pas confisqués au profit du Roi, au profit du fisc; Clément V, en vertu de son autorité apostolique, de son pouvoir personnel, et sous sa seule responsabilité, cassa l'Ordre parce que le Roi de France, son fils chéri, avait cette affaire à cœur (cui negotium erat cordi). Les immeubles échappèrent à la convoitise de Philippe, restèrent biens d'Église, et furent adjugés aux Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem et à d'autres gens d'Église.

Lorsqu'on emploie les termes généraux : condamnation de l'Ordre du Temple, on se sert d'expressions qui tendraient à faire croire qu'il n'y eut qu'un seul procès, celui dirigé contre l'Ordre.

L'auteur fait ici une distinction importante. Il y eut deux sortes de procès : les uns, dirigés contre les personnes des Templiers, furent instruits par des commissions d'inquisiteurs et jugés par des conciles provinciaux institués en France et à l'étranger ; l'autre procès fut suivi contre l'Ordre seul (contre la personne morale) ; ce procès fut instruit par une grande commission spéciale nommée par Clément V, qui siégea à Paris ; il devait trouver des juges au concile général de Vienne.

Les personnes furent condamnées par les conciles de Sens (Paris), de Senlis (Reims), de Pont-de-1'Arche (Rouen), par les conciles de Pise, de Florence, de Provence, de Sicile. Les Templiers furent déclarés innocents par les conciles de Ravenne, de Salamanque, de Mayence. Le concile de Londres, tout en reconnaissant l'innocence des Frères, les condamna à la pénitence perpétuelle ; ils furent répartis dans divers couvents ; ils y menèrent une conduite édifiante d'observance et de piété.

Le concile de Vienne refusa de juger l'Ordre, de le condamner sur le vu de l'enquête de la grande commission : 1° parce que l'Ordre n'avait pas été cité; 2° parce qu'un grand nombre de conciles provinciaux avaient absous les personnes et proclamé l'innocence de l'Ordre.

Philippe le Bel fut l'inventeur de ces divers procès, et, suivant l'expression de Dupuy, le Roi fut le premier qui remua cette pierre. Rien n'est plus exact.

Les autres motifs, c'est-à-dire les autres prétextes, furent ceux mis en usage au moyen âge contre tout ce que le despotisme voulait faire disparaître : l'hérésie, l'apostasie, l'idolâtrie, les mauvaises mœurs. Les moyens de preuve employés (et qui étaient toujours infaillibles) consistèrent dans la torture, 1$ question, les violences, les menaces de mort, la terreur, les promesses d'argent, de subsides et de pensions, la subornation des témoins, le mensonge, les manœuvres pratiquées dans les prisons, la partialité des juges ecclésiastiques, la pression exercée sur le plus grand nombre, la corruption de quelques-uns.

Les aveux arrachés par la torture, la douleur et les menaces de mort constituaient à cette époque des preuves juridiques. Un grand nombre de Templiers se rétractèrent; mais ils furent condamnés au feu, comme impénitents, obstinés et relaps.

Dans quelques maisons du Temple, et non dans toutes on faisait subir au profès une épreuve terrible et détestable. On imposait au profès, qui venait de prêter son serment en entrant dans l'Ordre, l'épreuve de renier Jésus-Christ, de cracher sur la croix, de subir des baisers indécents. C'était une épreuve d'obéissance passive, d'abnégation de volonté ; l'épreuve du reniement se retournait contre les ennemis de la foi.

On jugeait, d'après la résistance opposée par le profès à se soumettre à cette redoutable épreuve, de l'énergie qu'il déploierait en combattant les infidèles, du refus opiniâtre, inébranlable, de renier Jésus-Christ et sa foi pour sauver sa vie, s'il venait à tomber entre les mains des Sarrasins.

Cette série d'épreuves n'était qu'une détestable et grossière plaisanterie... un jeu... une brimade : « trufa… » « jocus… » un semblant... une fiction... qui n'avaient aucune conséquence pour la foi ; il n'en restait plus rien, lorsque le profès était revenu de cette épouvante.

L'enquête fait connaître divers incidents qui ont entraîné la conviction de l'auteur. Cette opinion s'appuie sur des textes nombreux.

Ceux qui voudront lire les documents inédits, méditer et peser l'ensemble des témoignages, décideront si l'auteur s'est trompé.

Au cours de la volumineuse enquête à laquelle il fut procédé à Paris, trois Templiers seulement dans tout l'Ordre, vaincus par la torture, la douleur et les menaces de mort, se sont accusés d'infamies, mais ils se rétractèrent. L'enquête nous donne leurs noms et nous fait connaître leurs déclarations.

Philippe le Bel s'appropria toutes les valeurs mobilières du Temple, qui étaient incalculables ; sa famille, sa femme, ses enfants et son frère Charles de Valois en usèrent largement. L'auteur a essayé d'établir le compte des valeurs immenses qui furent usurpées « approfitées » par le Roi et sa famille.

La destruction de l'Ordre du Temple ne profita en rien à la nation, qui perdit l'action utile, dans le Levant, en Grèce et en Orient, d'une milice qui, composée en la plus grande partie de Français, sagement réformée, aurait pu créer une marine florissante, un vaste empire, des relations commerciales et politiques considérables qui échappèrent à la France dans le présent et dans l'avenir. Aucun témoignage ne s'est produit concernant les prétendues habitudes criminelles imputées aux Templiers... tous protestèrent. La preuve entreprise contre eux et centre l'Ordre reste pour nous à l'état de calomnie et de diffamation : la règle punissait des peines les plus sévères (la prison perpétuelle, in pacé) ceux qui étaient convaincus de telles ignominies.

Les documents joints à la Règle attestent qu'elle fut de tout temps appliquée sans pitié à ceux qui se rendaient coupables d'actes pareils.


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